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Psychologie historique et littéraire

ANALYSE TRANSACTIONNELLE

L'Analyse transactionnelle

 B à Ba des relations humaines

Philippe de Ladebat

 

L'inaction ou la solitude peuvent générer l'ennui ou le mal être, qu'on évite principalement par nos activités et nos relations avec nos semblables. Toutes nos expériences dans ce domaine, accumulées depuis notre naissance, font de nous de vrais généralistes-praticiens en relations humaines. Pourtant les choses ne se passent pas toujours au mieux dans nos relations avec nos proches, amis, collègues de travail, voisins, commerçants ou étrangers, etc. ; parfois on ne se comprend plus, comme si chacun parlait un langage différent, parfois on ressent un trouble ou un malaise à l’issue d’une conversation, parfois  même la conversation dégénère en conflit.

L'Analyse Transactionnelle, dont le Professeur Éric Berne a créé les concepts de base, développés ensuite par ses successeurs, nous propose un langage et une grammaire pour examiner nos éventuelles difficultés de communication et de relations, ainsi que des moyens simples pour y remédier.

C'est à chacun de travailler sur ses expériences personnelles afin d’en tirer profit pour l'avenir. On ne trouvera donc pas ici de théories pour spécialistes, ni des recettes toutes faites ou miraculeuses, ni d'autre proposition d'aide ou de thérapie, mais seulement un  " B à Ba relationnel ", composant une boite à outils qui ne servent que si l'on s'en sert !

 

 

Tout ça pour ça : fais-moi un signe !

La nourriture physique ne suffit pas à l’être humain, il lui faut aussi des nourritures psychologiques. Aux stimulations physiques que doit recevoir le jeune enfant pour ne pas dépérir et se développer (nourriture, caresses, voix, etc.) s'ajoutent ensuite les stimulations symboliques du langage. Nos comportements s'expliquent ainsi en partie par notre recherche de "SIGNES DE RECONNAISSANCE" de nos semblables.

Ces signes des autres qualifient positivement ou négativement ce que nous sommes et sont alors dits inconditionnels (ex. « Vous êtes rigoureuse » ou « Vous êtes négligent ») ; quand ils concernent ce que nous faisons, ils sont dits conditionnels (ex. " Votre rapport est bien structuré " ou " Votre dossier était mal classé "). D’une façon générale, les signes adressés à notre personne ont toujours plus d'impact sur nous, agréable ou désagréable, que ceux qui s'adressent à nos actes.

Bien qu'on soit normalement libre d'en donner ou pas et de les accepter ou non, les usages sociaux ou familiaux règlent l'utilisation des signes de reconnaissance. En fonction de notre éducation et de nos besoins personnels nous avons plus ou moins de facilité ou de difficulté à en donner aux autres, à les refuser des autres, à les demander aux autres ou à les refuser aux autres. Cette pénurie artificielle fait des signes de reconnaissance une denrée rare alors qu’ils sont à la libre utilisation de tous. Ainsi la plus grande inégalité peut exister entre deux personnes concernant leur manque ou leur trop plein de signes reçus ou échangés. Lorsqu’une personne est privée et "en manque" de signes de reconnaissance, il arrive qu’elle recherche des signes négatifs, par exemple en faisant volontairement des erreurs ou des choses interdites, pour attirer l’attention et éviter à tout prix l'indifférence des autres.

Enfin les signes de reconnaissance conditionnels sont très souvent utilisés, notamment en éducation ou le marketing, pour modifier les comportements : on adresse des signes positifs pour encourager la répétition des comportements recherchés, et des signes négatifs pour tenter de faire disparaître un comportement non désiré.

 

Notre moteur à émotions : comment recharger ses batteries ?

Nous recherchons des signes de reconnaissance car ils sont générateurs des émotions qui alimentent notre énergie psychique. Faute de suffisamment de signes reçus, nous ne ressentons plus d'émotions variées, notre énergie psychique baisse et c'est parfois la déprime.

Nos batteries émotionnelles sont plus ou moins exigeantes : certains se satisfont de peu (le solitaire), d'autres ont de très gros besoins affectifs (le sociable). Lorsque l'on est en manque on en vient à manipuler l'entourage pour en obtenir coûte que coûte, en utilisant des " stratagèmes psychologiques" générateurs d'émotions fortes (voir infra).

Notre moteur fonctionne avec quatre émotions de base : la peur, la joie, la colère et la tristesse. Les autres sentiments, plus élaborés, sont tous dérivés de ces émotions de base. Chacune de ces émotions de base peut-être fonctionnelle quand elle apparait de manière adéquate, ou dysfonctionnelle quand elle n’est pas en rapport avec ce qui se passe

Ainsi une émotion exprimée peut en cacher une autre : pour ne pas montrer sa peur à ses enfants Pierre pique une colère…Pour ne pas montrer sa colère à sa belle-mère Angèle exprime de la tristesse… Il arrive ainsi qu'on exprime des émotions factices " apprises " ou favorites et acceptables par notre entourage ou dans certaines situations, plutôt que celles que nous ressentons profondément. L'éducation a parfois tendance à nous dicter ce que l'on doit ressentir. Par exemple, une mère dit à son petit garçon : " Un garçon ne pleure pas ! (leçon donnée : ne manifeste plus ta tristesse si tu es un homme) et dira peut-être à sa fille " Tu n'es vraiment pas belle quand tu es en colère!" (leçon donnée : ne manifeste plus ta colère car ce n’est pas beau pour une femme).

Les émotions authentiques, agréables ou désagréables, sont normalement exprimées dès qu'elles sont ressenties : on réagit et on passe à autre chose. Si l'émotion n'est pas exprimée et refoulée, et si on exprime une émotion de façade, l'émotion vraie est " stockée ", on la garde sur le cœur pour la ressortir éventuellement plus tard dans des circonstances où elle ne sera pourtant plus adaptée à la situation. Ainsi par exemple M. Dupont qui a retenu sa colère en se montrant docile devant son patron au travail, va piquer une grosse colère en rentrant chez lui pour une cause futile et c'est son entourage familial qui en fait les frais sans comprendre ce qui se passe.

Dans les cas plus graves l’accumulation d’émotions négatives non exprimées peut provoquer des drames à retardement car la personne qui les exprime alors en bloc, en explosant tout d’un coup, pense que son comportement est justifié par le stock d’émotions négatives retenues jusque-là. Dans un film de Woody Allen, un assassin justifie son crime en disant au juge : « Cela faisait dix ans qu’elle me faisait de la soupe à la tomate et je n’aime pas ça ! ».   

 

L'ennui de l'ennui : que faisons-nous de notre temps ?

                                                    Afin d'éviter les affres de l'ennui et de la solitude, il nous faut organiser notre temps pour obtenir notre dose suffisante de signes de reconnaissance permettant de maintenir nos batteries émotionnelles niveau de charge où nous nous sentons bien. Dès qu'on sort de la solitude et du retrait du monde (méditation, rêverie, souvenirs, sommeil, etc.) on a un choix de "divertissements" pour éviter l’ennui : « Un roi sans divertissement est un homme plein de misères » écrivait Pascal. Que faire, que dire après avoir dit "Bonjour" ? écrit Éric Berne en résumant nos cinq façons d’utiliser notre temps : 

LES RITUELS : Cela va du " Bonjour/Bonsoir " aux échanges sociaux organisés comme les cérémonies de félicitations, de condoléances, etc. Dans ces genres d’échanges convenus, tout est normalisé, prévisible et sans risque. Ce minimum relationnel  ne  permet d’échanger que des signes de reconnaissances à très faibles portée émotionnelle.

LES PASSE-TEMPS : Il s'agit de conversations sur des sujets anodins où l’on n’est pas soi-même impliqué ni  notre interlocuteur. Exemples : les conversations chez le coiffeur, en attendant l'autobus, pendant une pause-café, dans un cocktail,  etc. où l'on parle d’une nouvelle application pour smartphone, de la grève des pilotes de ligne, du dernier film, etc.

L'ACTIVITE : C'est une façon pratique et souvent utilitaire, d'utiliser son temps en " faisant quelque chose " : envoyer un e-mail, jouer d’un instrument, faire des photocopies, apprendre un nouveau logiciel, repeindre sa cuisine, jardiner, faire du jogging, travailler en général… etc. Les activités sont notre plus grande défense contre l'ennui. Elles nous procurent des signes de reconnaissance par elles-mêmes (intérêt, satisfactions personnelles) soit par les signes de reconnaissance qu’elles nous permettent d’obtenir des autres (remerciements, félicitations, rémunérations, etc.)

LES STRATAGÈMES : Il s'agit de situations relationnelles où l’on se trouve un partenaire à manipuler pour obtenir de lui ou lui administrer de fortes doses de signes de reconnaissance négatifs. Ces types d’échanges ont de très forts impacts affectifs. En général on ne s’en rend compte que lorsqu’il est trop tard et qu’on ressent un sentiment désagréable, un malaise, en se demandant « Pourquoi m’a-t’il dit cela ? »  ou « Qu’a-t’il voulut me dire par là ? »(voir infra)

L'INTIMITE : Ici les échanges sont à la fois francs et confiants, mais très impliquant car chacun se montre à l'autre tel qu'il est en exprimant ses vrais désirs et émotions réels tels qu'il les ressent ici et maintenant. Pas de dissimulation, pas de mensonge, pas de sous-entendus, pas de manipulation. C'est la façon la plus gratifiante d'employer son temps en termes de qualité et de quantité de signes de reconnaissance. On la vit bien sûr dans une relation de  couple réussie, mais aussi entre très bons amis ou dans des équipes de sport ou de travail bien soudées.

Selon notre degré d’engagement ou d’implication  personnel dans l’une ou l’autre de ces façons d’utiliser notre temps, un dialogue, une relation, une situation,… (un enterrement par exemple) peuvent être vécus comme un rituel, un passe-temps, une activité, un stratagème ou de l’intimité.

 

Soigner son style ! : tout est communication

On ne peut pas ne pas communiquer : paroles, expressions du visage, postures, même notre silence dit quelque chose à l'autre; nous nous exprimons au moins par trois styles d'attitudes et de comportements :

le mode PARENT : Nous sommes alors soit autoritaire et moralisateur (Parent critique), soit paternaliste et protecteur (Parent aidant). Le Parent recherche et distribue des signes de reconnaissances à sa mesure : des jugements, des opinions, des principes, des règles morales, des préjugés, des usages, pour le Parent critique, et des conseils, des consolations, des suggestions, des encouragements, des bonnes paroles,  pour le Parent aidant.

le mode ADULTE : Nous sommes alors attentifs, concentrés, objectifs, pondérés, logiques et sans préjugés ni ressenti ou expression de sentiments ou d’émotions. L’Adulte recherche et distribue des signes de reconnaissance à sa mesure : des faits et données objectifs, des constats, des modes d’emploi, des informations factuelles, etc.

le mode ENFANT : Nous sommes alors soit "Spontané " en manifestant nos émotions naturelles, sans retenue, telles que nous les ressentons sur le moment ; soit "Adapté" en feignant des émotions pour faire plaisir aux autres (Adapté soumis) ou, à l'inverse, afin de les choquer pour obtenir leur attention (Adapté rebelle). C'est surtout quand nous sommes " Enfant " que nous recherchons beaucoup de signes de reconnaissance et que nous donnons aux autres les signes les plus forts. Ces signes sont non seulement verbaux mais aussi comportementaux : proximité, expressions du visage, tons de voix, gestes, etc.

À chacun son mode de communication

Comme notre interlocuteur s'exprime lui aussi selon ces trois modes, il en résulte cinq types de dialogues principaux : Parent/Parent, Adulte/Adulte, Enfant/Enfant, Parent/Enfant ou Enfant/Parent.

Dans ces genres de dialogues complémentaires, les partenaires sont sur la même longueur d'onde et tout se passe généralement bien.

Il arrive cependant que l'interlocuteur ne réponde pas avec le style complémentaire attendu, mais sur un mode qui coupe la conversation.

Par exemple Marie propose son aide à Louis "Je vais t'aider" (Parent aidant vers Enfant) et attend un "Merci de m'aider" (Enfant vers Parent aidant). Au lieu de cela si la réponse est : "Occupe-toi plutôt de tes affaires" (Parent critique vers Enfant) la communication s'interrompt ou dégénère.

On peut éviter ce genre de difficultés, qui peut finir en pugilat, en renvoyant plutôt à l'autre le message complémentaire attendu pour calmer le jeu, quitte à s'expliquer plus tard en " Adulte ". Dans l'exemple ci-dessus, plutôt que de renchérir avec un "Tu es vraiment désagréable" (Parent critique vers Enfant), dire "Tu as raison je vais terminer mon travail" (Enfant vers Parent critique).

Enfin il arrive que les messages soient cachés et que le vrai message ne soit pas clairement exprimé. Le "Voulez-vous monter prendre un dernier verre ?" n'exprime pas forcément l'intégralité de la proposition. D'ailleurs l'offre fait long feu si l'autre ne répond qu’au message explicite "Non-merci je n'ai pas soif". Devant ce genre de messages avec sous-entendus, on a toujours cette option de ne réagir qu’au message explicite, ce qui peut provoquer l’expression du vrai message et clarifier la relation.

Dans toutes ces circonstances on maîtrise mieux ses communications en repérant le style de notre interlocuteur, qui peut être habituel ou occasionnel, soit pour s'y adapter soit pour l'en faire changer en changeant nous-mêmes de style avec lui, d’où l’importance de bien repérer dans quel état Parent, Adulte ou Enfant, on se trouve soi-même.

Et nos relations internes ?

Nous communiquons avec les autres mais aussi avec nous-mêmes car nos trois états (Parent, Adulte et Enfant) entrent aussi en relation entre eux. Ces dialogues intérieurs sont courants : notre Enfant a envie d’un gâteau, notre Parent critique nous dit que ce n’est pas sérieux pour notre régime et notre Parent aidant nous dit qu’il n’y a pas de mal à se faire du bien…Ce sera éventuellement à notre Adulte de décider.

Enfin il nous faut veiller à ce que notre Adulte ne soit pas contaminé par des émotions de notre Enfant (sympathie ou antipathie par exemple) ou par des réactions de notre Parent aidant (indulgence) ou des opinions  et préjugés (généralisations hâtives : tous les … sont des…). Les personnes chargées de recrutement ou d’appréciation des personnes doivent spécialement y prendre garde.  

 

Une affaire d'opinions : être ou ne pas être "OK" ?

La communication et les relations humaines ne sont pas des combats de boxe mais la société occidentale, les situations de compétitions, une certaine éducation etc. incitent souvent à se mesurer, non seulement par rapport à nos propres critères et réalisations ou choix personnels, mais aussi par rapport à ceux des autres.

Au résultat nous avons tous une certaine opinion sur nous-mêmes : Positive/OK : Je suis une femme ou un homme bien, ou négative/KO. : Je ne vaux pas grand-chose..., couplée à une opinion sur les autres : Positive/OK : Les autres sont des gens bien ou Négative/KO : les autres ne valent pas grand-chose.

La combinaison de notre opinion sur nous-mêmes et de notre opinion sur les autres donne quatre genres d'attitudes qui façonnent notre mode de relations en général :

=Je suis OK, les autres sont OK : Avec cette attitude, on s'accepte tel que l'on est et on accepte les autres comme ils sont, on a confiance en soi et dans nos possibilités d'actions conjointes : nos échanges sont alors constructifs et facilitent le progrès des relations.

=Je suis OK, les autres sont KO : Avec cette attitude on a tendance à s'estimer supérieur aux autres, on est méfiant et on a le sentiment de vivre dans un milieu hostile. On a alors tendance à rechercher les situations qui confirment notre opinion en nous mettant toujours en position de supériorité.

=Je suis KO, les autres sont OK : Dans ce cas au contraire on se trouve inférieur aux autres et on manque de confiance en soi. Soit on se replie sur soi-même, soit on recherche des situations de soumission aux autres qui confirment l’opinion négative que l’on a sur soi-même.

=Je suis KO, les autres sont KO : Quand on vit ce genre de position, on a tendance à tout laisser tomber en se disant qu'on ne vaut rien dans un monde peuplé de gens qui ne valent  pas grand-chose non plus.

Suivant les circonstances nous sommes conduits à expérimenter l'une ou l'autre de ces attitudes, de manière passagère ou durable. Le plus souvent on ne voit dans notre entourage que ce qui nous conforte dans notre attitude et nos opinions de base : si l'on se sent OK/KO on aura par exemple tendance à ne voir chez les autres que leurs défauts pour renforcer notre opinion d'être toujours le meilleur. Si l’on se sent KO/OK on aura tendance à ne voir que les succès des autres, à s’en plaindre ou à les jalouser.

Changer de point de vue et d'opinion sur soi et les autres, peut permettre de découvrir d'autres aspects de la réalité ou des comportements des autres et on se trouve ainsi mieux à même de comprendre une situation et de traiter les éventuels problèmes qu’elle soulève.

 

Les "Stratagèmes" : petits drames entre amis !

On a vu que les "STRATAGEMES" étaient l’une des façons de lutter contre l’ennui et de passer son temps. Ceux "Jeux pervers" comme on les nomme aussi souvent, permettent d'échanger des signes de reconnaissance négatifs, donc de susciter chez l'autre des émotions désagréables, à partir de trois rôles possibles :

Le "SAUVEUR" : estime en savoir plus que l'autre et fait semblant d'aider ou en fait trop pour se valoriser ; le but n'est pas vraiment d'aider, mais de se sentir meilleur que les autres. Le "sauveur" est toujours à la recherche de "victimes" qui justifient et renforcent son rôle.

La "VICTIME" : toujours prête à se lamenter et à appeler au secours sans vraiment en avoir besoin. Son but est souvent de montrer aux autres qu’ils sont incapables de traiter nos problèmes. La "victime" fait semblant de rechercher un "sauveur" dont elle n’a pas réellement besoin, ou un "persécuteur" qui la confirmera dans son rôle de "victime"

le "PERSECUTEUR" : lui est à la recherche d'une "victime" consentante pour se prouver qu'il est toujours indispensable.

Exemple « soft » dans un grand magasin.

1er acte : La cliente qui joue la " Victime " pour qu’on s’intéresse à elle : "Ah je suis exténuée, pouvez-vous m'aider, je ne trouve rien qui me va." Le vendeur : "Essayez donc cette veste-ci".

2ème acte : Le vendeur propose successivement une dizaine d'autres vestes en s’installant  dans le rôle complémentaire de " Sauveur " dans lequel il se sent un type bien : il en fait trop sans s'enquérir du vrai besoin ; la cliente trouve toujours quelque chose qui ne va pas : C'est trop long, trop court, démodé, etc.

Le vendeur sent qu'il n'en sortira jamais car la cliente n'a pas vraiment besoin de son aide ; quant à la cliente elle attend le moment d'exprimer sa colère rentrée jusqu’ici.

3ème acte : deux fins possibles :

Soit la cliente passe de "Victime" à "Persécuteur" en disant, furieuse " Vous ne me passez que des vestes qui ne me vont pas, on se demande où vous avez appris votre métier". Elle en tire un bénéfice psychologique qui la fait se sentir bien face à ce vendeur qu’elle juge incompétent pour l’aider.

Soit c'est le vendeur qui en a assez et passe de "Sauveur" à "Persécuteur" en disant "Vous ne savez pas ce que vous voulez, j'ai autre chose à faire...". Son bénéfice psychologique est de se dire "Après tout le temps que j’ai perdu avec elle, elle n’est même pas reconnaissante !"

Au total de fortes doses de signes de reconnaissance négatifs auront été ainsi échangées de part et d’autre, sans que le problème soit réglé.

Dans le stratagème chacun choisit son rôle de départ pour piéger l’autre dans son jeu favori et le coup de théâtre survient quand l'un des deux ou les deux en même temps changent de rôle : c’est à ce moment-là que se déchargent les sentiments négatifs. 

Pour éviter le piège face à une prétendue « Victime », il faut refuser la dévalorisation du départ, par exemple en posant des questions avec son Adulte. Dans notre exemple le vendeur  aurait évité le piège de départ en posant d’abord à la cliente des questions sur ses gouts de couleurs, le genre de veste qu’elle recherche, etc.

Plus généralement toutes les personnes en situation d’aide (médecins, formateurs, conseillers, assistant social, etc.) peuvent se trouver piégées par des personnes qui ne cherchent qu’à leur montrer, au final, qu’elles sont incapables de résoudre leurs problèmes. De leurs côtés les "aidants" ne sont pas toujours des saints laïcs et leur jeu peut-être pervers : si les gens n’ont plus de problèmes, ils n’auront plus de clients, d’adhérents, etc.

 Dans une relation d’aide, il faut éviter en général de "faire à la place" de l'autre : il vaut mieux lui demander une contribution même faible pour lui donner du pouvoir. Le plus souvent il suffit de  ne faire d’abord que 50% du chemin et de demander une contribution au moins égale au demandeur d'aide. S’il accepte c’est qu’il a réellement besoin d’aide, s’il refuse c’est qu’il n’a pas vraiment besoin d’aide et veut seulement vous montrer que son problème est trop difficile pour vous et que vous êtes incapable de le résoudre.

 

Nos chiens de garde : attention aux mauvais sorts !

En complément de nos opinions sur nous et sur les autres (Cf. OK ou KO) on peut aussi repérer des éventuelles règles habituelles qui nous font agir – ou font agir les autres - sans qu'on en soit toujours bien conscient. Ainsi l'éducation usuelle de nos pays européens fixe un certain nombre de prescriptions auxquelles on croit devoir se soumettre pour se sentir OK ; par exemple :

= SOIS PARFAIT. Cette petite voix nous souffle en permanence qu'il faut toujours être le meilleur et viser la perfection en toute circonstance. À défaut on doit se sentir coupable, inférieur, pas bien, perdant, etc.

= FAIS VITE. Cette prescription nous rappelle que le temps est compté et qu'il faut toujours se dépêcher, sinon on est un lent, un paresseux et les autres arriveront avant nous.

= ESSAYE. Quand on ressent cette prescription l'important n'est pas de réussir mais d'essayer, de faire des efforts et de montrer combien on se démène sans résultat.

= SOIS FORT. Cette prescription qui s'adresse plutôt aux garçons, leur dit qu'un homme doit toujours dominer ses émotions et ne pas montrer ses faiblesses.

= FAIS PLAISIR. Cette prescription qui s'adresse plutôt aux filles, leur dit de ne pas rechercher leur propre plaisir mais d'abord de faire plaisir aux autres.

On a tout intérêt à repérer en soi ce genre de "mauvais sorts" qui peuvent nous gâcher la vie, nuire à notre développement personnel et fausser nos relations avec les autres.

On peut s'en remettre plutôt à nos "Anges gardiens" qui nous disent au contraire qu'on peut être OK et bien dans sa peau sans être parfait, en prenant notre temps, en réussissant ce qu'on veut, en exprimant les émotions qu’on ressent et en se faisant plaisir à soi-même.

 

Analyse Transactionnelle : le reste est VOTRE affaire !

"La carte n'est pas le territoire" mais seulement une représentation de celui-ci. Le langage et la grammaire de l'Analyse Transactionnelle ne sont pas, non plus, LA RÉALITÉ, ce sont seulement des cartes et des outils pour la traiter.

Ces outils peuvent aider à comprendre ce qui se passe concrètement dans nos échanges avec les autres en sachant que nous ne communiquons pas sur une réalité objective mais sur les représentations toujours subjectives que nous en avons les uns et les autres.

Pour régler des éventuels problèmes il est peu efficace de s'acharner à faire "toujours plus de la même chose" (répéter ou même accentuer nos façons habituelles de faire, de dire et d'être). l'A.T. peut aider au contraire à "faire autre chose ou à faire autrement" en nous offrant  d'autres choix.

 

Pour aller plus loin que ce "B. à ba Relationnel"  de la communication on peut utilement lire directement les ouvrages d’Éric Berne :

=Psychiatrie et psychanalyse à la portée de tous (Fayard, 1ère éd. 1971)

=Des jeux et des hommes (Stock, 1ère éd.1975)

=Que dites-vous après avoir dit bonjour ? (Tchou, 1ère éd. 1977).

Et pour amuser utilement son Enfant : Carlo M. Cipolla : Les lois fondamentales de la stupidité humaine (PUF, 2012)

 

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